Marseille-Provence : le rêve marseillais
A partir de son mémoire de Master, Fabien Pecot nous propose ci-après sa vision des enjeux marketing de la région de Marseille.
Marseille - provence : le rêve marseillais. Ne riez pas ! C’est un souhait plus qu’une utopie, un objectif de communication auquel je suis arrivé pendant mon mémoire de Mastère pour la Rouen Business School, consacré au marketing territorial de la métropole phocéenne, et que je vais résumer ci-après.
Si l’on veut s’interroger sur la communication de marque de la métropole marseillaise, il faut rappeler un point capital : une métropole existe bien comme entité (MPM) mais elle ne reflète pas la réalité du bassin de population qui est beaucoup plus étendu (appelons-le Marseille-Provence : un arc de cercle allant de Toulon à Arles en passant par Aix) et rassemble 2,2 millions d’habitants. Cette différence est à la source du débat autour du Grand Marseille qui déchire la région.
En 2013, Marseille-Provence sera Capitale Européenne de la Culture. On parle ici bien de Marseille-Provence, et pas MPM : c’est le point de départ de mon mémoire car il représente un succès obtenu ensemble mais aussi une opportunité de grandir ensemble, et enfin, une particularité qui peut différencier durablement cette métropole des autres : pour une fois, on fait naître une métropole par la culture et pas par l’administration ou le tissu économique !
Plusieurs lectures, entretiens et recherches documentaires m’ont amené à définir trois défis pour tout d’abord faire exister une métropole conforme à la réalité du bassin de population, et ensuite la promouvoir avec succès.
Défi n°1 : faire collaborer Aix et Marseille et empêcher Marseille d’être une capitale « despotique » car il ne peut pas exister de Grand Marseille sur le modèle du Grand Lyon, Toulouse ou Paris, c'est-à-dire, pour caricaturer, sur un modèle jacobin « capitale-province ».
Après avoir été « snobées » par Marseille tout au long de sa splendeur (1830 – 1960), les villes alentours se sont structurées avec succès en opposition à la ville centre. Elles représentent aujourd’hui un poids suffisant pour exiger une métropole « fédérale », ce que la notion d’archipel métropolitain proposée par M. Cousquer illustre bien.
Ce dernier avait comparé la construction de Marseille-Provence à celle de l’UE, et si l’on veut filer la métaphore, Aix et Marseille sont un peu la France et l’Allemagne. Marseille doit faire des concessions pour convaincre les villes périphériques d’entrer dans le jeu métropolitain, à commencer par Aix. Comment ? En permettant à Aix, une ville brillante mais limitée par son poids démographique, de passer au niveau supérieur sur les sujets qui l’intéresse : par exemple devenir un Cambridge-en-Provence, ou aussi un hub de premier plan pour les nouvelles technologies en Europe.
Il faut rassurer les autres communes sur le fait que la métropole à vocation à profiter à tous et pas à financer des politiques de grandeurs d’élus marseillais ou aixois. Par exemple, en s’assurant que le président de la métropole ne soit jamais le maire de Marseille ou d’Aix.
Défi n°2 : améliorer l’image de la ville de Marseille, tout en protégeant ce qui fait sa spécificité. Ce travail doit être entrepris en parallèle pour permettre à Marseille de redevenir un pôle attractif pour les autres communes de la métropole, et aussi pour les acteurs extérieurs.
Il s’agit de définir un positionnement attractif mais suffisamment différent de ce qui se fait ailleurs (Paris, Lyon, Toulouse…). Marseille n’a pas pour l’instant les atouts socio-économiques lyonnais ou toulousains pour lutter sur le même terrain, mais peut s’inspirer de Berlin et son « Berlin est pauvre mais sexy ».
Plutôt qu’un travail « me-too » qui reproduirait le schéma classique, il faut prendre la ville telle qu’elle est, séparer ce qui est du domaine du purement négatif (insécurité, saleté…) et ce qui n’est pas un problème en soi, mais parfois traité comme tel (immigration, culture méditerranéenne, tendance à la rébellion…). En parlant franc : ce n’est pas en vidant Marseille de ses habitants actuels et en les remplaçant par des parisiens et des européens du nord que l’on optimisera le potentiel de la ville !
Le défi consiste à s’attaquer aux aspects purement négatifs, tout en faisant la promotion assumée des spécificités qui font de Marseille une ville unique.
Défi n°3 : réconcilier Provence et Méditerranée, afin de ramener à la vie l’identité et la culture communes à Marseille et son arrière pays. On a trop souvent opposé la Provence latine et française à la Marseille méditerranéenne et cosmopolite.
Cette notion est fondamentale car la ville comme la région souffrent d’un manque de repères identitaires, ce qui nuit à l’opinion que se font les habitants de leur territoire (un manque de fierté et d’ambition très différent de Barcelone ou Valence), et nuit à l’image projetée vers l’extérieur.
Il faut redonner du souffle à la culture provençale dans tout ce qu’elle a d’intégrateur et d’évolutif, en promouvoir les références (Pagnol, Cézanne, Mistral mais aussi Izzo, Guédiguian, Lacroix etc…), redonner de la place à la langue dans l’espace public, et en renforcer l’enseignement à l’école…
Bien sûr, cette culture doit être présentée telle qu’elle est aujourd’hui : tournée vers l’autre, faite d’apports constants (italiens, espagnols, magrébins, français, corses…), et pas comme un moyen d’exclure l’autre, qu’il vienne de Paris ou d’Alger.
Il est important de s’attaquer à ces trois défis pour pouvoir mettre en place un positionnement articulé autour de trois points de réputation :
- · La métropole des passions : là où on vit tout plus fort, en opposition au conservatisme de villes comme Lyon et Paris.
- · Pleine de contrastes : quartiers populaires ou bourgeois, centres urbains et parcs naturels, mer et montagne, on peut y être soi-même.
- · Un trait d’union entre deux mondes : où se rencontrent occident et orient.
A partir de là, voilà quelques idées d’actions qui exploitent le potentiel de cette métropole différente : ouvrir un musée de la contre-culture à Marseille, structurer l’offre universitaire d’Aix comme un Cambridge au soleil, accueillir un Forum Social Mondial ou un G20 des ONG entre Toulon, Arles, Vitrolles etc…, organiser un sommet mondial interreligieux autour de la Paix, renommer les noms des lignes de TER (la ligne Cézanne, la ligne Camargue…).
Il n’est jamais facile de se lancer à publier un résumé, surtout lorsqu’on est passionné et conscient du temps dont on a manqué pour approfondir des points clés. J’espère tout de même avoir pu apporter une très modeste contribution au débat métropolitain, et soulever quelques questions qui me semblaient importantes. Si vous vouliez en savoir plus, poursuivre la discussion ou obtenir l’intégralité du document, n’hésitez pas à me contacter ici.