Nouvelle donne pour l'attractivité économique des territoires ?
ANCORIS et le Groupe SCET ont publié en février 2024 leur Baromètre de l’attractivité des territoires. Il offre un point de vue intéressant sur la réalité de l’attractivité en France et les transformations en cours. Cette enquête en ligne réalisée auprès de 257 collectivités et acteurs locaux entre novembre et décembre 2023 se fonde sur une analyse des projets d’investissements identifiés par Ancoris jusqu’en 2023. « Avec cette publication, nous avons voulu partager nos constats sur l’attractivité et identifier les enjeux clés pour les territoires en partant également de leurs attentes par une enquête et des interviews » nous a indiqué Guillaume Gady, Co-Fondateur & CEO d’Ancoris.
Une stabilisation des flux de projets détectés
Ancoris est l’une des sociétés leaders dans la détection de projets d’investissements en France. Ainsi, le Cabinet a détecté plus de 8 000 projets d’investissements en 2023. Ces projets deviennent des projets d’implantation lorsqu’ils ont été qualifiés à partir de plusieurs critères permettant de les caractériser tels que les besoins immobilier / foncier, montant des investissements, date de mise en oeuvre, localisations pressenties, etc.
En excluant les projets commerciaux et touristiques, ce sont 1 700 projets d’implantation qui ont été détectés par Ancoris en 2023. Ces projets sont essentiellement d’origine française, les projets internationaux ne représentent environ que 8 % du total. Ancoris indique sur la base des analyses des années précédentes que ces projets se traduisent par 170 implantations en moyenne par an, soit 10 % des projets d’implantation détectés. Ces taux de transformation sont intéressants et reflètent la réalité du métier de la prospection d’entreprises.
Après le rattrapage de l’année 2020 et la reprise économique observée en 2021, l’année 2023 marque une légère baisse (- 1 %) du nombre de projets d’implantation détectés en France par Ancoris. Toutefois, avec 1 700 projets d’implantation, l’année 2023 se situe un peu au-dessus de la moyenne 2019-2023 (1 676 projets en moyenne annuelle). Dans un contexte difficile, voire anxiogène, cette résilience des projets d’implantation illustre la confiance des dirigeants d’entreprises. De plus, la part des projets inscrits dans au moins l’une des dimensions de la RSE poursuit sa hausse, avec 22 % des projets détectés en 2023, contre seulement 3 % en 2021.
Les projets tertiaires sont en tête
L’analyse des projets par grands secteurs révèle la hiérarchie suivante : tertiaire (596 projets d’implantation), industrie (392 projets), logistique (363 projets), BTP (192 projets) et autres (151 projets). Pour le secteur tertiaire, deux éléments sont mis en avant : le besoin d’hypercentralité des entreprises et la diminution de la taille moyenne des locaux recherchés (170 m² en 2023 contre 207 m² en 2020).
Les projets industriels progressent en France, notamment au regard de 2019 et malgré un contexte difficile. La nature de ces projets change avec notamment une prise en compte croissante des enjeux de la transition écologique. Ces projets sont fortement désirés par les territoires, notamment s’ils sont créateurs d’emplois, à fort impact social et environnemental ou dans une activité souveraine (agroalimentaire, énergie, défense, etc.).
Quant à la logistique et le commerce de gros, ils connaissent une très forte baisse du nombre de projets (- 18 % en un an) traduisant la moindre envie des territoires d’accueillir de tels projets. Ancoris constate néanmoins l’émerge de projets logistiques « durables », qui reposent généralement sur des solutions décarbonées.
Enfin le contexte difficile (prix des matériaux, crise de l’immobilier, raréfaction foncière, etc.) explique la forte baisse des projets dans le BTP (- 36 % en un an) mais les enjeux de transition écologique pourraient porter ce secteur dans les prochaines années.
Les territoires sont toujours en attente d’attractivité
/image%2F0936074%2F20240508%2Fob_c536a1_principaux-freins-ancoris-scet-2024.png)
Malgré les débats sur l’attractivité et ses effets pervers notamment en termes de disponibilité des ressources, l’enquête SCET-Ancoris révèle que 94 % des décideurs territoriaux pensent que l’attractivité demeure un sujet important voire stratégique. La question pour eux ne tient pas dans une décision du type «Go / No Go», mais dans l’évolution des stratégies d’attractivité pour qu’elles puissent embrasser les transitions économiques et environnementales.
Ces élus et développeurs économiques sont également optimistes voire très optimistes, à hauteur de 88 %, pour le développement de leur territoire.
Cependant, cet optimisme des dirigeants territoriaux se heurte à plusieurs freins pour l’implantation d’entreprises parmi lesquels on peut citer la faible disponibilité foncière, les difficultés de recrutement rencontrées par les entreprises ou encore l’indisponibilité des solutions immobilières adaptées aux besoins des entreprises.
Les 5 recommandations d’Ancoris et du Groupe SCET à destination des territoires
En guise de conclusion, les équipes des deux cabinets formulent 5 recommandations à destination des territoires :
- Cibler les secteurs d’activité économique liés aux priorités économiques et industrielles nationales, l’industrie (favorisant la transition écologique) étant placée largement en tête des attentes des élus et développeurs économiques ;
- Répondre aux besoins d’accompagnement et d’implantation des activités endogènes. Pour Sébastien Martin, Président d’Intercommunalités de France et cité dans l’étude, l’endogène génère davantage d’emplois que l’exogène ;
- Poursuivre le développement des solutions d’accueil immobilières et foncières en s’adaptant aux nouveaux enjeux : recensement et valorisation des friches, étude de nouveaux outils et modèles de commercialisation de l’immobilier d’entreprise comme le bail à construction, recensement des possibles « gisements » fonciers, ou encore valorisation de l’offre disponible ;
- Proposer un accompagnement complet pour favoriser la concrétisation des projets les plus complexes ;
- Poursuivre les efforts et initiatives pour améliorer la qualité du cadre de vie des habitants et des salariés.
Ces cinq recommandations peuvent être complétées par celles de Laurent Saint-Martin, Directeur général de Business France également interviewé dans cette étude, pour qui les territoires devraient : a) investir plus fortement dans la construction d’argumentaires économiques plus précis car ceux trop génériques ne fonctionnent plus ; b) continuer à jouer collectif à l’échelle locale ; c) adapter les pratiques des développeurs économiques par un plan de formation et d) agir sur le temps long car l’attractivité nécessite « un investissement sur la durée, et avant qu’un projet ne s’implante, ce sont plusieurs années d’efforts ».
Pour télécharger le baromètre, il suffit de cliquer ici.
Analyse et propos recueillis en mai 2024 par Vincent Gollain