ONLY LYON, le marketing territorial à la sauce lyonnaise
Deuxième étape du Tour de France des pratiques de marketing territorial 2018, Lyon avec sa très célèbre approche du marketing territorial, Only Lyon. Beaucoup d’articles ont été rédigés sur cette démarche, y compris sur ce blogue, alors qu’écrire de plus ? Plutôt que de tenter de vous offrir un résumé supplémentaire, je propose dans cet article de retenir 5 enseignements majeurs tirés de cette démarche novatrice.
- Rien ne vient pas hasard
Le but de la démarche Only Lyon est clairement affirmé sur son site Internet : « faire rayonner Lyon sur la scène internationale ». Cette ambition n’est pas le fruit du hasard. Elle s’inscrit dans la dynamique engagée depuis le tout début des années 1990 et qui, de manière assez consensuelle sous l’angle politique (le célèbre modèle lyonnais de gouvernance territoriale), vise à renforcer nettement le rôle de Lyon comme métropole européenne de rang international. Dans ce contexte, lorsque l’Aderly montre en 2005 - 2006, appuyé par des études d’un célèbre cabinet d’audit, que Lyon stagne dans les classements européens et apparaît trop dispersé dans ses tournées internationales du fait de la multiplicité des logos des acteurs, le milieu des décideurs locaux était déjà très sensibilisé au sujet de l’attractivité internationale. Or, il se trouve qu’à la même période, le marketing territorial commençait timidement à se répandre parmi les acteurs et décideurs français travaillant sur l’attractivité des territoires. Il faut dire que le lancement en 2004 par Amsterdam d’une démarche intégrée de marketing territorial ou les stratégies puissantes mises en place par les britanniques, à commencer par Londres, commençaient à produire leurs effets. La réussite de Barcelone dans l’utilisation des JO de 1992 a également montré la nécessité de lier les programmes d’investissement urbain avec du marketing urbain. Que retenir ? Le marketing territorial est d’autant plus efficace que le milieu local est sensibilisé aux enjeux d’attractivité territoriale.
2. Le choix stratégique, adapté au contexte lyonnais, de ne pas créer une structure supplémentaire
Les lyonnais ont pris dès le départ ce qui apparait pour moi comme une décision stratégique de long terme : ne pas créer une structure juridique supplémentaire pour l’équipe Only Lyon, mais s’appuyer sur les compétences des structures existantes et héberger administrativement cette équipe au sein de l’Aderly, l’agence de développement. Ce choix a permis d’aller plus vite, de s’appuyer sur un réseau de partenaires fondateurs plongés dans leurs éco-systèmes et d’éviter le développement de luttes intestines sur ce qui aurait été la gouvernance d’une nouvelle structure. Le choix d’externaliser l’équipe Only Lyon du Grand Lyon est également stratégique car cela permet de donner de la flexibilité dans la conduite opérationnelle des actions, tout en conservant un pilotage assez serré à travers le management de cette équipe par la gouvernance Only Lyon.
L’articulation des rôles entre l’équipe Only Lyon et les autres acteurs est d’ailleurs clairement définit. L’équipe mutualisée Only Lyon (7 personnes, 2 millions de budget) déploie, dans le cadre de la plateforme de marque, en soutien de ses partenaires ou bien en propre une série de moyens visant à renforcer l’image et la notoriété de Lyon sur la scène internationale : campagnes de communication, Relations Presse, réseau d’ambassadeurs, stratégie digitale, gestion du Sky Room et autres initiatives de portée collective. Les partenaires fondateurs et les entreprises, utilisent et déclinent ces outils pour leurs besoins propres. Les agences opérationnelles comme l’Aderly ou l’Office du tourisme travaillent dans un cadre cohérent en matière de politique de marque de la destination Lyon, tout en conservant toute leur autonomie sur leurs actions dans leurs domaines respectifs de compétence.
Cette approche lyonnaise, assez rare en France à l’époque, tire sa force d’un réseau puissant de partenaires au service d’une même ambition. Pour l’avenir, selon le programme de développement économique « 2016-2021 » adopté le 19 septembre 2016 et l’analyse de la Chambre régionale des Comptes de 2017, la métropole de Lyon a exprimé sa volonté de « faire évoluer la démarche ONLYLYON » et de « réinventer la gouvernance de l’attractivité lyonnaise à travers la création d’un système plus intégré, plus ouvert, plus efficace sur le modèle de métropoles européennes telles que Berlin ou Londres ».
3. Une démarche apprenante et de partage
Même avec des compétences fortes et des moyens cumulés importants, un avantage important de la démarche Only Lyon tient également dans sa capacité à évoluer dans le temps, se remettre en cause, benchmarker les meilleures pratiques, être à l’écoute, etc. En effet, il est impossible de réussir du premier coup en marketing territorial. La capacité à évoluer, saisir des opportunités, tout en gardant le cap stratégique défini initialement est essentiel. Force est de constater qu’Only Lyon a plusieurs fois prouvé sa capacité à se revisiter. Cela a d’ailleurs débuté avec la première campagne internationale Only Lyon de 2009 (voir ci-dessous) qui avait été saluée comme une initiative française particulièrement novatrice en matière de marketing territorial mais laissait planer, par les visuels très esthétiques de l’époque, une certaine froideur de la Capitale des Gaules qui allait dans le sens des clichés déjà existants sur le milieu lyonnais. Or, dans le démarrage de cette démarche, la nécessité d’être attractif auprès des personnes (visiteurs, salariés, investisseurs, futurs habitants, etc.) avait été soulignée.
Apprendre, c’est aussi partager et force est de constater qu’Only Lyon, en plus de son storytelling sur sa propre démarche exemplaire, est également assez partageuse sur ses ambitions, questionnements, mais aussi orientations en matière de marketing territorial comme le témoigne ce post de 2011 sur les tendances clés. Bien entendu, nombre d’informations stratégiques restent confidentielles mais de nombreuses délégations reçues par exemple au Sky Room de la Tour Oxygène ont eu des réponses poussées à leurs questions. Cette ouverture des acteurs Only Lyon a contribué à la notoriété de la démarche.
4. Un plan d’actions à la convergence des énergies
La démarche fédère aujourd’hui 28 partenaires publics et privés qui co-construisent, dans le cadre d’un dispositif de management de projet territorial, le programme collectif de marketing international ONLYLYON. Celui-ci est créé et mis en œuvre par l’ensemble des partenaires, chacun dans son domaine ou collectivement via les actions coordonnées par l’équipe opérationnelle mutualisée et qui travaille en lien avec l’ensemble des forces vives de Lyon à l’international. L’engagement des habitants, ambassadeurs ou des « nombreux amis » de Lyon comme les correspondants à l’étranger sont fortement encouragés notamment à travers les médias sociaux.
Ce management opérationnel de projet permet de déployer un plan d’actions de grande envergure à l’échelle de l’ensemble des partenaires. Chacun reste maître de ses actions, peut être renforcé par des partenaires et dépasse ainsi ce qu’il aurait pu faire seul.
Ceci explique parfois la difficulté à se procurer des chiffres pour répondre à la question d’apparence simple : combien coûte le programme Only Lyon ? Il y a quelques années, le chiffre de 6 millions d’euros était parfois indiqué. En fait, à mon sens, il faudrait aller plus loin en agrégeant les budgets de l’Aderly, de l’Office du Tourisme et des Congrès du Grand Lyon, de l’équipe mutualisée et d’une partie de celui du service développement économique du Grand Lyon. En effet, ces 4 structures sont au cœur de la démarche par les actions qu’elles mènent.
5. Une démarche qui s'appuie sur un processus original de management territorial
De nombreux territoires ont en tête, lorsqu’ils démarrent une démarche de marketing territorial de s’inspirer de celle d’Only Lyon, mais peu y parviennent ! En effet, Only Lyon est une démarche originale de marketing territorial, très proches de bonnes pratiques internationales comme Amsterdam, Hambourg ou Oslo, mais avec peu d’équivalents en France malgré tous les benchmarking réalisés par les uns et par les autres. La raison principale pour moi n’est pas spécialement le niveau budgétaire, qui peut s’adapter aux moyens locaux, mais la difficulté à faire en France du management territorial de projet inter-acteurs. En effet, si mettre en place une vision partagée entre acteurs publics, privés ou associatifs se révèle déjà complexe, la démarche Only Lyon montre que la performance passe par la capacité des acteurs à travailler ensemble dans un cadre efficace et de confiance qui permette à la fois aux acteurs de se renforcer dans leurs métiers, mais aussi de tirer profit d’une approche transversale. Pas simple dans une même organisation d’organiser de la transversalité, alors à l’échelle territoriale !
Article : Vincent Gollain, 11 juillet 2018