Le marketing territorial : perspectives 2017 - partie 1
2017 s’est engagée, déjà à grande vitesse pour de nombreux marketeurs. Pourtant, les résolutions prises pour cette nouvelle année restent encore présentes à l’esprit, et notamment celles qui tournent autour de l’idée de « lever la tête du guidon », « prendre du recul », anticiper, être proactif, etc. Facile à (se) dire, plus difficile à mettre en œuvre dans notre société aux rythmes accélérés par les nouvelles technologies, l’immédiateté des attentes et la surconsommation d’informations.
Pour v(n)ous aider à penser 2017 et les années suivantes, voici quelques idées sur les perspectives du marketing territorial tirées de mes lectures, diverses et variées, réflexions et bien sûr échanges nombreux avec celles et ceux qui font le marketing territorial en France et à l’international.
Ces idées sont regroupées en trois familles : l’esprit marketing marketing ; les enjeux et les outils.
Faire souffler l’esprit marketing sur la France reste nécessaire
Contrairement à de nombreux autres pays développés, la France s’est engagée plus tardivement dans la voie du marketing considérant pendant longtemps que « si le produit est bon, il trouvera naturellement ses débouchés ». Malheureusement, les entreprises puis les territoires ont fait le constat, parfois amer, que la réalité du fonctionnement des marchés ne repose pas sur cette règle. D’autres mécanismes puissants interviennent et le marketing apporte de réelles solutions pratiques aux entreprises, mais aussi territoires en mal d’attractivité. Pour autant, le marketing territorial n’est pas la recette magique, voire la poudre de perlimpinpin, que certains annoncent ou mieux vendent à grand prix aux élus, décideurs et techniciens territoriaux. Faire du marketing territorial est une décision stratégique à bien peser car elle va se traduire par un engagement fort, dans une voie pas toujours très simple car basée sur beaucoup de diplomatie locale qui nécessitera une forte implication des acteurs locaux mais aussi de se définir des objectifs ambitieux mais réalistes à moyen long terme. Bien sûr des victoires rapides sont possibles et nécessaire, mais soyons sérieux, il faut y passer du temps pour mettre en place les mécanismes vertueux à la base des succès de grandes destinations comme Amsterdam, Austin, Barcelone, Berlin, Copenhague, Dublin, Londres, Lyon, Reims, Stockholm ou Strasbourg, mais aussi de nombreuses autres, plus petites, mais tout aussi efficaces dans leurs segments de marché (Albi, Alpes de Haute-Provence, Brive la Gaillarde, Fort-Worth Downtown, Glasgow, Grand Roissy – Le Bourget, Otaniami, Petersburg, Val Thorens).
Faire du marketing territorial, c’est donc, d’abord et avant tout, adopter un état d’esprit centré sur la satisfaction des clientèles visées, les techniques employées étant au service de cette ambition et évoluant au fil des innovations et retours utilisateurs. Vouloir faire du marketing territorial, c’est aussi s’inscrire dans un projet collectif qui vise surtout à améliorer le niveau de vie des habitants, créer de l’emploi et réduire les inégalités. Pour ce faire, après une phase d’études et de définition des objectifs poursuivis, il va s’agir de mettre en place un ensemble coordonné d’actions directes et indirectes pour peser favorablement sur les prises de décision des acteurs visés. En 2017, les principes de base du marketing territorial resteront sur le fond les mêmes. Il s’agira de connaître toujours mieux ses prospects et clients dans toute leur diversité ; de se différencier des concurrents ; d’attirer l’attention, de susciter le désir et l’envie des cibles retenues ; de mobiliser toujours plus les acteurs du territoire et ambassadeurs et enfin d’évaluer les actions menées et dépenses effectuées. Si les grands principes restent inchangés et les progrès indiscutables en une dizaine d’années, force est de constater qu’il reste du chemin à parcourir pour parvenir à multiplier en France des démarches fortes de marketing territorial reposant sur des fondations solides et pérennes.
Pour moi, il nous faut poursuivre les efforts dans plusieurs directions en France pour être efficace et nous placer à la hauteur des meilleures pratiques internationales :
- La professionnalisation des personnes engagées dans l’attractivité des territoires et le marketing territorial s’est développée en France du fait de la multiplication de l’offre de formation continue et plus modestement initiale. Il est essentiel de poursuivre dans cette voie et notamment de pousser les établissements d’enseignement supérieur à renforcer ce qu’ils font déjà, à multiplier les formations sur « l’attractivité et au marketing territorial » et introduire des modules consacrés à cette discipline dans les autres formations (géographie, économie spatiale, sciences politiques, écoles de management, etc.). L’attractivité de la France et ses territoires passera aussi par cette voie. La proximité que les marketeurs territoriaux entretiennent localement avec les établissements d’enseignement supérieur est certainement un bon levier pour augmenter les volumes d’enseignement.
- La sensibilisation des dirigeants locaux, élus et responsables, est également clé. Là encore je constate régulièrement des niveaux de connaissance et d’appropriation très différents qui vont s’échelonner de la maîtrise absolue des attendus possibles de cette approche à la suspicion pure et simple. Là encore, on s’aperçoit qu’il serait nécessaire de mieux sensibiliser les dirigeants locaux à la réalité du marketing territorial. C’est également vrai pour les entreprises et acteurs économiques qui sont sensibilisées à s’impliquer dans de telles démarches sans en comprendre vraiment les ressorts et les avantages qu’elles peuvent en retirer.
- Le partage, entre professionnels, de méthodes, techniques, bonnes pratiques et pièges à éviter reste également d’actualité ! Certes, les colloques et formations organisés depuis plusieurs années ont permis de donner à voir ce qu’est le marketing territorial mais souvent les pratiques présentées sont restées centrées sur la présentation (marketing) des démarches globales et d’outils, souvent de communication d’ailleurs. Les échanges sur les études de marché, l’analyse des données, la connaissance et le benchmarking des concurrents, l’évolution des aspirations, la construction de positionnements, les évaluations, etc. restent beaucoup plus limités. Il faut dire que cela nécessite d’aller plus en profondeur et souvent dans des aspects jugés plus confidentiels des démarches de marketing territorial. Les asiatiques ont l’habitude de dire, « le bonheur de mes amis fera mon bonheur ». Reprenons cette maxime à notre compte. Partageons, dans des lieux neutres de toute influence, plus encore les recettes des succès engrangés, mais aussi les motifs d’échecs de certaines démarches et actions. Ceci fera progresser notre connaissance collective au service de l’attractivité de nos territoires te plus globalement de la France et ses partenaires.
- La discipline du marketing territorial s’est étoffée mais force est de constater que certains concepts restent mal maîtrisés, certaines pratiques encore hésitantes et l’analyse en profondeur de bonnes et mauvaises pratiques assez faible. Il faut poursuivre l’enrichissement de la boîte à outils. En effet, malgré la multiplication des initiatives d’universitaires, l’organisation de colloques, la parution d’articles et ouvrages sur ce sujet, le corpus méthodologique de cette discipline reste trop faible. Comme d’autres disciplines, et du fait des dépenses effectuées par les collectivités territoriales, le marketing territorial devrait être encouragé par un programme public d’aide à la recherche académique et appliquée passant notamment par le soutien renforcé à la réalisation de thèses, l’accueil d’étudiants et chercheurs étrangers, le soutien aux initiatives locales permettant d’améliorer les pratiques et techniques, etc.
A suivre !